Cercle de la Transformation du Travail : Partage de la Valeur
Premier thème du Cercle de la transformation du travail, le partage de la valeur est un sujet au cœur du contrat social et de l’engagement.
Les principaux constats à propos du partage de la valeur
Malgré la mise en exergue de distribution de hauts niveaux de dividendes par les entreprises du CAC 40, on ne constate pas de déformation majeure dans la répartition de la valeur entre salariés et actionnaires dans les 20 dernières années. En parallèle, on constate un élargissement des mécanismes d’association des salariés à la création de valeurs, notamment via de nouveaux mécanismes de type Prime de Partage de la Valeur (6 millions de bénéficiaires en 2023) et l’extension aux salariés des PME des mécanismes d’épargne salariale (ANI 2023 repris par la loi).
En revanche, on constate que si l’emploi s’est développé de manière significative au cours des dernières années (1,7 M emplois créés), il est de plus en plus difficile de bien vivre de son travail quand bien même on est en emploi, et ce pour de nombreuses raisons.
- Des raisons conjoncturelles : inflation élevée notamment sur 2022 et 2023, Poids croissant des dépenses contraintes avec augmentation des budgets transports, logement, alimentation
- Des raisons structurelles :
- des salaires qui stagnent ou progressent très modérément depuis 15 ans, avec une productivité en berne, voire à la baisse
- un écrasement de la hiérarchie des salaires avec 17,4% des salariés payés au SMIC,
- une faible mobilité sociale, avec un ascenseur social en panne et des effets de seuil en termes d’exonération de charges sociales et de prime d’activité qui n’incitent pas à augmenter les salaires et à développer la qualification
- de fortes disparités entre grandes entreprises et PME, et entre métropoles et territoires, qui conduisent à la fois à des pénuries de compétences et à une faible dynamique d’évolution professionnelle.
Le focus très important sur la priorité de rendre l’emploi peu qualifié plus compétitif, avec des allègements de charges sociales significatifs, a permis d’obtenir des bons résultats en termes de développement de l’emploi, mais pas encore suffisamment de développement de l’emploi qualifié, seule condition qui permettrait de développer les rémunérations et le pouvoir d’achat des salariés.
Au-delà de mieux répartir la valeur, il s’agit d’accélérer la création de valeur pour améliorer de concert performance des entreprises et pouvoir d’achat.
Le Cercle explore 3 pistes majeures pour parvenir à un choc de qualification :
- Développer la qualification de l’emploi et la promotion interne
- Relancer de l’ascenseur social en privilégiant les compétences internes avec des dispositifs de formation structurés et massifs
- Développer une approche plus stratégique de la formation professionnelle,
- Remettre le sujet de la formation au niveau du COMEX, en s’inscrivant dans une logique d’investissement et dans un horizon de temps pluri-annuel,
- Prioriser les formations les plus qualifiantes pour amener vers les métiers pénuriques, en focalisant et en mutualisant les financements
- Déstandardiser les formations pour tenir compte des compétences déjà acquises et aller vers plus de sur-mesure
- S’engager dans des logiques de co-investissement, d’abondement et de contractualisation avec le salarié
- Faire de la grande entreprise le chef de fil du développement de l’emploi qualifié dans son écosystème
- Donner de la visibilité sur les compétences clés à venir de la filière dans le cadre des différentes transitions écologiques, numériques et démographiques
- Ouvrir son appareil de formation ses fournisseurs et sous-traitants, et mutualiser les investissements
- Développer des parcours professionnels croisés au sein de l’écosystème, en veillant à ne pas capter pour son compte les compétences des PME partenaires
- Partager les bonnes pratiques de développement de compétences
- Améliorer l’équilibre territorial de la production de valeur
- Rééquilibrer l’aménagement du territoire, pour lutter contre la métropolisation de l’économie et ses effets induits (renchérissement des coûts de loyers, transports et frais de garde dans les grandes métropoles et difficultés à attirer entreprises et salariés dans les territoires isolés)
- Relancer les infrastructures nécessaires à l’accueil des entreprises, mais aussi des salariés et de leurs familles, et réattirer les établissements d’enseignement supérieurs hors des plus grandes métropoles
- Mutualiser les ressources en formation en articulant financement région et intercommunalité
- Développer une véritable GEPP des territoires pour favoriser la gestion à froid de l’adaptation des compétences et les transitions professionnelles vers les métiers pénuriques
En synthèse, la France s’est dotée d’une boîte à outils, comprenant des mécanismes suffisamment divers et variés, notamment grâce à l’ANI de 2023, pour permettre une répartition de la valeur comparable aux meilleures pratiques en Europe. Elle a réussi à retrouver un taux d’emploi qui s’approche de la moyenne européenne. Elle n’est pas parvenue à faire en sorte que les actifs puissent bien vivre de leur travail.
Il faut désormais retrouver une dynamique autour de la création durable de valeur qui inscrive le développement de l’emploi qualifié en tant que cause commune partagée par les pouvoirs publics, les entreprises et les partenaires sociaux, permettant de sortir de mécanismes qui ont trop souvent arbitré en faveur de l’allègement du coût du travail au détriment du développement de la qualification et de la relance de l’ascenseur social.
Le rapport complet du Cercle est disponible sur demande
En savoir plus sur Le Cercle de la Transformation du Travail
Créé en octobre 2023 par Bruno Mettling, Président de Topics, le Cercle de la Transformation du Travail a pour ambition de poser un regard prospectif et structurant sur les grandes questions qui ont un impact sur l’organisation du travail avec un triple angle de vue : travail – emploi et compétences. Cette recherche de pluralisme dans l’approche, le Cercle l’aborde aussi à travers ses membres : des acteurs politiques (Xavier Bertrand et Myriam El Khomri, anciens Ministres du Travail), des partenaires sociaux (Geoffroy Roux de Bézieux, ex-Président du Medef et Laurent Mahieu, ex-Secrétaire Général UCC Cadres CFDT) et des DRH de grandes entreprises (Valérie Decaux, Groupe La Poste, Jean-Sébastien Blanc, Engie, Jean-Manuel Soussan, Groupe Bouygues, Stéphane Dubois, Safran).
L’animation et la coordination sont assurées par Topics (Bruno Mettling et Marc Grosser, Senior Partner, avec le concours de Fanny Barbier).